Avant d'engager ce débat, Yuna Chiffoleau, chercheur à l'Inra, a présenté les évolutions en cours dans l'organisation des circuits courts, mais aussi les freins que l'on peut rencontrer. Les collectivités locales ont un rôle à jouer, notamment à travers les Entreprises publiques locales, afin de lever quatre de ces freins : la nécessité de développer et structurer l'offre alimentaire en maintenant des outils de transformation, sans les asphyxier sous des contraintes réglementaires de plus en plus fortes, la clarification de l'offre circuit court face à la prolifération d'offres dites de proximité, la multiplicité des formes organisationnelles entraînant la confusion, la structuration de l'offre et de la demande et donc le rôle à jouer par les collectivités pour la mise en réseau, l'éducation pour consommer différemment.Au niveau de l'Etat, l'importance des circuits courts est bien évoquée, mais peu de moyens sont mis en œuvre. Il faut pourtant construire un modèle économique nouveau selon Yuna Chiffoleau et les Epl pourraient permettre d'inventer ce nouveau schéma. Il faut repositionner le rôle des différents acteurs afin de favoriser l'approvisionnement local et lever une autre série de freins : réglementaires (réglementation des abattoirs, Code des marchés publics), économiques (les produits locaux étant souvent considérés plus chers et encore plus lorsqu'ils sont bios), humains en raison de la méconnaissance entre acteurs de différents niveaux, logistiques et organisationnels, le déficit de recherche et développement en agroalimentaire.Face à ce constat, Jean-Marie Sermier, député du Jura et vice-président de la Fédération des Epl, a rappelé quelques points de vigilance complétant en partie les constats de Yuna Chiffoleau, et mettant par ailleurs l'accent sur le fait que l'offre n'est pas forcément cohérente par rapport à la demande et il n'est pas nécessaire de développer de nouveaux schémas non viables. Il est nécessaire d'abandonner tout esprit de dogmatisme en la matière, il faut fiabiliser et structurer sur le long terme et l'économie mixte a toute sa place pour faire progresser cette démarche. Face à ces constats, deux élus ont présenté la démarche engagée par leur collectivité.Florence Presson, adjointe au maire de Sceaux, en charge de la vie scolaire, péri-scolaire et des centres de loisirs municipaux, a présenté la démarche initiée par la ville afin de répondre à l'attente citoyenne et afin de permettre à la collectivité de reprendre en main la qualité de son service tout en répondant à terme aux objectifs fixés dans le Grenelle de l'environnement. Fort du constat que la qualité des prestations fournie par les prestataires extérieurs ne répondait pas à l'attente en termes de logistique, de qualité, et de respect des objectifs fixés, la collectivité a décidé de rechercher les moyens d'optimiser les conditions de réalisation de la prestation en inscrivant son action dans le cadre de sa politique de développement durable. La collectivité a donc décidé, dans le cadre d'un projet intercommunal, considéré comme l'échelle pertinente de réflexion en la matière, de créer une cuisine centrale, susceptible de produire 5 400 repas chaque jour. Les objectifs de ce projet sont notamment de maîtriser les coûts de cette restauration collective, la qualité des repas et la sécurité alimentaire, d'embaucher une équipe de professionnels non délocalisable, de développer un outil pédagogique pour les enfants (et les parents) et d'assurer une politique raisonnée des achats dans le cadre d'une approche de développement durable. La Société publique locale a été considérée comme l'outil pertinent pour développer ce projet de cuisine centrale en répondant à l'ensemble des objectifs recherchés par la collectivité. La ville a par ailleurs d'autres ambitions à terme dans le cadre de la politique raisonnée des achats par la création d'une Société coopérative d'intérêt collectif.
Raymond Couderc, sénateur-maire de Béziers a fait part de la volonté politique que peut avoir une collectivité de développer un outil d'économie mixte au service de la restauration collective, en y adjoignant une stratégie d'achat auprès des producteurs locaux, les missions données à la Sem Occitane de restauration. Raymond Couderc a cependant mis l'accent sur les difficultés que ces partenariats locaux peuvent quelquefois connaître en raison notamment des prix pratiqués, des exigences ou des quantités produites. Il reste donc selon lui du chemin à parcourir pour la structuration de l'offre.
L'implication des collectivités dans ce processus est donc de plus en plus importante. On peut le constater dans le secteur des abattoirs où la réglementation de plus en plus poussée oblige les collectivités à reprendre en main ces outils et à y investir des sommes conséquentes. Face à ce constat, Gérard Trémège, maire de Tarbes, président de la Communauté d'agglomération du Grand Tarbes, a décidé de constituer une Société d'économie mixte pour reprendre en main l'abattoir, faire les investissements nécessaires à sa restructuration, et permettre de le développer en s'appuyant sur un partenaire privé afin de développer un outil économique pérenne et source d'emplois locaux.En complément, la Somimon a présenté le rôle que les marchés d'intérêt national peuvent avoir sur leurs territoires afin de développer les circuits alimentaires de proximité, permettre un axe de développement aux producteurs, une rencontre de l'offre et de la demande, mais aussi permettre, dans un rôle social nouveau, aux populations en difficulté, d'avoir accès à la production locale en développant une relation gagnant-gagnant entre les Restos du Cœur et les producteurs. C'est cette expérience de circuit alimentaire de proximité, qui va se dupliquer sur d'autres territoires, que Gabrielle Deloncle, vice-présidente de Montpellier Agglomération, présidente de la Somimon, a présenté, accompagné d'Olivier Lauro, directeur de la Somimon.