L’aménageur SEBL Grand Est aura investi 13,5 millions d’euros jusqu’à la fin de l’opération, fixée à 2024, pour reconvertir l’emprise de 30 hectares. Déjà consommé aux trois-quarts, ce budget s’équilibrera pour moitié par les subventions de la région Grand Est, du Département et de l’Etat et par la contribution de la communauté de communes (Terres Touloises), le solde étant généré par le produit de la vente ou de la location. Pour Thierry Hory, président de la SEBL, l’Espace K est un bon exemple de reconversion capable d’inspirer d’autres projets.
A l’heure où l’on parle de réindustrialiser la France, l’Espace K peut donner des idées à d’autres collectivités…
C’est en effet un projet atypique puisque la Sebl a participé à la fois à la conversion du site puis à sa reconversion. C’est un chantier de longue haleine, qui remonte à une dizaine d’années et qui prend tout son sens au cœur de cette crise sanitaire. L’idée est de refaire vivre un site industrielle. 850 emplois ont été supprimés à Toul après le départ de Michelin. Aujourd’hui, avec les 15 entreprises qui se sont réinstallées, 350 emplois ont été recréés. 75 % du site ont été réindustrialisés. De tout mal sort un bien, pourrait-on dire concernant la pandémie. Cette crise sanitaire nous impose de redéfinir les priorités en matière de réindustrialisation.
Quelle est la bonne recette à suivre ? L’Espace K est-il duplicable ailleurs ?
Dans une telle dynamique, notre expérience peut permettre à d’autres sites de s’inscrire dans une vision à long terme. En dix ans, ce que nous avons pu faire sur l’Espace K peut être un bon exemple parce qu’il s’agit d’un temps court. D’un site mono-industriel, nous en avons fait un écosystème ouvert sur la ville, avec une approche pragmatique et sans que prédomine une doctrine unique. Avant la Covid-19, le thème de la réindustrialisation avait du mal à dépasser le cadre du discours. Dans les projets de nouvelles commercialisations, on sent bien que certaines entreprises sont créées sur de nouveaux champs industriels peu occupés avant la crise sanitaire. Certaines industries que l’on avait enterrées sont de retour à la faveur de cette crise. Sans doute qu’il coûtera plus cher de produire sur place certains services, mais c’est le prix à payer de notre autonomie économique.
De plus, le territoire lorrain sait s’adapter et se sortir des crises…
Le tissu économique lorrain, qui a subi la désindustrialisation et la réindustrialisation, dispose d’un réel savoir-faire en la matière. En notre qualité d’aménageur, nous sommes des acteurs mobilisés pour atteindre l’objectif du « zéro artificialisation nette » voulu par le gouvernement et destiné à lutter contre l’étalement urbain. Nous avons l’habitude de gérer la complexité et la reconversion des friches industrielles et/ou militaires. Notre pays dispose de réels atouts en la matière et ce type d’intervention urbaine peut répondre à un réel besoin.
Le Plan de relance du gouvernement peut bénéficier aux Epl qui entendent tirer leur épingle du jeu en termes de réindustrialisation…
Il est essentiel que les Epl soient exigibles à ces aides et qu’elles accompagnement les collectivités territoriales dans leurs grands projets. Dans les secteurs du logement, de la mobilité, de l’aménagement dans le cadre du plan « zéro artificialisation », beaucoup de projets peuvent être pilotés par les Epl. Le cas des friches industrielles ou militaires est emblématique : quand une collectivité ne peut s’appuyer sur une Epl, elle est bien en difficulté pour faire aboutir son projet, étant obligée d’en passer par un opérateur privé où la gouvernance politique est naturellement absente. Dans une politique d’aménagement qui passe aujourd’hui par la densification des centres-villes et la reconversion des friches, le recours aux Epl va s’amplifier. Les Epl peuvent ainsi peser d’un poids non-négligeable dans l’avenir.