Dans la recherche d’un pont entre les sujets qui intéressent les juristes et ceux qui passionnent les financiers, la réflexion s’est arrêtée cette année sur la capacité à démontrer ses bonnes pratiques. Comme Monsieur Jourdain, les entreprises publiques locales font souvent de la lutte anti-corruption sans le savoir tant les références de bonnes pratiques font partie d’une culture commune.
Tristan Mourre, Associé Sustainability Services, au sein du cabinet Mazars, a présenté le cadre européen de comptabilité extra-financière qui, avec la transposition de la directive CSRD, va s’appliquer aux entreprises de plus de 250 salariés, 50M€ de CA ou 25M€ de bilan (deux de ces trois seuils). Reprenant pour partie les critères de la taxonomie verte pour les opérateurs financiers, ce cadre prévoit plus d’un millier de points de contrôles normés potentiels répartis sur des objectifs sociaux, d’environnement et de gouvernance. Sans devoir se soumettre à cette batterie d’indicateurs, les entreprises plus petites seront néanmoins entraînées par le courant via les donneurs d’ordre, les acteurs financiers et l’ambiance générale. Il sera donc stratégique pour les Epl de déterminer sur quels points précis elles souhaitent pouvoir quantifier et démontrer la qualité de leur action.
Les chiffres contestent le « tous pourris »
Luc Brunet, Responsable de l’Observatoire de la SMACL, a présenté son panorama de la mise en cause pénale des élus. C’est un témoin précieux de l’évolution de la réponse pénale, qui montre que les poursuites et les condamnations sont à nouveau en hausse relative, tirées par le sujet des atteintes à la probité. Très loin du refrain de « tous pourris », les chiffres bruts sont extrêmement faibles au regard du nombre d’élus.
La lutte anti-corruption est un impératif pour les entreprises publiques locales. Au-delà des seuils de la loi Sapin 2 pour les grandes entreprises, Frédéric Fievet Directeur Associé Secteur Public et Stéphanie Dominguez, Senior manager « Compliance » chez KPMG, ont rappelé que les Epl sont justiciables d’un contrôle de l’AFA (Agence française anticorruption). Après un rappel des différentes mesures de prévention, ils ont apporté leur regard de praticiens, le premier historiquement à la direction générale des services de collectivités et la seconde à l’AFA. Si les Epl peuvent se comparer très favorablement aux collectivités de taille et de ressources comparables, ils indiquent cependant que des marges d’amélioration nette sont à investir; elles doivent se doter largement de cartographies des risques et de dispositif d’alerte interne pour lesquels des méthodologies adaptées à chaque taille d’entreprise existent. L’existence de sanctions lorsque des faits sont constatés est importante. Ils ont également rappelé que la responsabilité des donneurs d’ordres et comptables s’appliquait aux Epl, et que sa réforme privilégie désormais la sanction des fautes lourdes à l’irrespect des procédures formelles.
Obligations de transparence et de mise en concurrence
Marie Courrouyan a apporté au débat l’expertise de la SCET sur la contribution de la commande publique à la prévention de la corruption. De fait, les obligations de transparence et de mise en concurrence agissent comme une sécurité automatique pour produire de la confiance et de la sécurité. Cependant, les entreprises publiques locales doivent prendre en compte cette dimension en affinant leurs procédures à toutes les phases, que ce soit dans l’organisation des achats, la définition de la demande, la vérification croisée des offres, la déclaration des conflits d’intérêts à la CAO ou le contrôle de l’exécution. La procédure ne vit par ailleurs que si elle est accompagnée de sensibilisation et de formations et s’insère de manière cohérente dans un dispositif plus large de prévention et de détection.
Claude Bonacossa et Thomas Josuat-Vergès, Directeur des garanties et Adjoint à la Directrice des aides à la CGLLS, ont enfin apporté une dimension plus riante au thème de cette séance en concluant par la présentation des nouveaux dispositifs d’aides et de garantie de la CGLLS au profit des acteurs du logement social. Après le cycle de la loi Elan, le nouveau dispositif de soutien favorise la consolidation à travers la constitution de groupes et les remembrements territoriaux, ainsi qu’un axe de soutien fort à la rénovation urbaine. Une enveloppe de 250 M€ de garanties est également prévue pour la rénovation énergétique du parc social dans le cadre de la stratégie nationale bas carbone.