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Journée de mobilisation sur le logement et la construction : des pistes pour sortir de la crise

Publié le 5 avril 2024

La journée de mobilisation Epl Réseau n’a pas été envisagée par la Fédération des élus des Entreprises publiques locales pour rester dans la seule déploration. Si la crise a des racines conjoncturelles et structurelles, elle peut être aussi une « opportunité » pour reprendre les mots de Cédric Grail, directeur général d’Altémed, pour remettre les choses à plat. Une journée de mobilisation qui s’est conclue par la mise en débat de 11 propositions. Le cadre est posé, les Epl sont dans les starting-blocks pour massifier les réponses concrètes déjà en cours.

Sonia de la Provoté est convaincue que la sortie de crise passera par une vision « aménagement » du logement (Photo DR).

Il y a deux manières d’être au cœur d’une crise : la subir ou essayer de réfléchir aux raisons pour lesquelles l’ensemble du secteur affiche une telle fragilité. L’horizon est connu, le changement climatique fixe le tempo de l’aménagement, pour limiter l’étalement urbain et rendre la densité urbaine désirable. Pour Sonia de la Provoté, sénatrice du Calvados et présidente de la Commission aménagement de la FedEpl, il va falloir clairement s’habituer à cette nouvelle donne : « La loi Climat et résilience et celle sur le zéro artificialisation nette (ZAN) ont encore du mal à percoler dans les territoires. La crise du logement ne doit pas être isolée : elle concerne la ville sous toutes ses formes, dans ses équipements, ses écoles, etc. Nous aurons à trouver de nouveaux gisements de foncier et, surtout, bien être au clair sur les besoins en matière de logement avec le vieillissement de la population et la décohabitation des familles », affirme-t-elle. Le temps de l’étalement urbain est derrière, celui des immeubles de 8 étages aussi. « Il faut donc trouver des solutions intermédiaires sans faire exploser les prix ». La sénatrice insiste sur la bonne maîtrise du foncier d’intérêt public, « du pas de porte jusqu’aux terrains agricoles, pour éviter que l’instinct spéculatif ne rende le sol trop cher ». Dans le Calvados, la densité n’est pas là où on le croirait : « Les quartiers les plus denses sont dans les faubourgs, pas forcément dans les centres anciens », assure-t-elle.

« Les Etablissements publics fonciers locaux réservent de moins en moins de terrains nus »

Arnaud Portier, secrétaire général de l’association nationale des Etablissements publics fonciers locaux (Epfl), explique comment le métier a évolué, avec l’acquisition par exemple de réserves foncières dont l’usage risque d’être modifié du fait de la pression exercée par le ZAN. « Cette incertitude sur le foncier poussent certains Epfl à la prudence, n’achetant plus de fonciers nus mais déjà artificialisés ». Joelle Boneu, directrice adjointe de l’Epf d’Ile-de-France, identifie la grande couronne comme un secteur peu densifié encore. « Mais il y a bien entendu la problématique des transports. On ressent en Ile-de-France la crise plus qu’ailleurs, avec des besoins de logements abordables plus importants qu’ailleurs. 25 % d’agréments en moins de logements sociaux cette année, c’est bien la preuve que nous ne parvenons plus à sortir suffisamment de programmes ». Le SDRIFE, Schéma directeur environnemental, qui détermine l’aménagement du territoire pour les 12 millions de Franciliens d’ici à 2040, est en phase d’achèvement de l’enquête publique. « C’est l’occasion de remettre à plat un certain nombre d’objectifs. Nous sommes nous aussi engagés dans une action contracyclique avec 7 000 logements produits en 2023, représentant une forme de stabilisation par rapport aux années précédentes. Aujourd’hui et surtout dans l’avenir, nous n’aménagerons plus dans de grosses opérations de type Saclay. 75 % du renouvellement urbain se fait dans le diffus, dans des immeubles à réhabiliter, des petites friches. Notre travail consiste à identifier les endroits où ces gisements sont possibles. Nous savons faire ».

Construire des biens que les gens peuvent acheter 

Cédric Grail, directeur général d’Altémed (Montpellier), insiste sur cette course contre la montre de l’aménagement, « alors que cette crise, ça fait des décennies qu’on la voyait venir ». Grâce à la loi Élan, la société de coordination Altémed a pu voir le jour et « c’est une sacrée innovation, permettant de mettre un Sem (SERM), une Spl (SA3M), un OPH et un énergéticien (la filiale de la SERM Energies du Sud) dans un même ensemble pour avancer au plus vite sur le terrain ». En 2020, un premier choc de l’offre a été organisé, avec une consultation d’ensemble sur 7 000 logements dans les tuyaux dans les Zac, « pour essayer de dégripper le mécanisme auprès des promoteurs immobiliers ». Et de conclure : « L’objectif est désormais de construire des biens à des prix que les gens peuvent acheter ». Cette séquence a été marquée par la présentation d’un cas d’étude d’une Spl sur de mobilité par l’avocat Pierrick Caradeux, ainsi que la présentation du Manifeste pour l’aménagement public par Olivia Toubiana, ancien responsable aménagement à la FedEpl, aujourd’hui directeur de l’urbanisme à la ville de Massy (Essonne).

Une loi sur le logement pas assez ambitieuse ? 

La dernière table ronde a été consacrée à l’offre de logements et à la gouvernance à repenser pour permettre aux acteurs et donc aux Epl d’être en phase avec les attentes de la population. Jérôme Baloge, maire de Niort et président de la communauté d’agglomération du Niortais, président de la commission Habitat de la FedEpl, regrette que la loi sur le logement annoncée par le gouvernement ne soit pas « plus ambitieuse, puisque l’on semble s’orienter vers une priorisation de l’action vers le logement intermédiaire, alors que nous, acteurs locaux, nous attendions bien plus que cela ». Jérôme Baloge est devenu président de la Semie, en 2020, pour son second mandat, « car le logement, après le Covid, dans la foulée du programme Action cœur de ville et de la passion affichée par les Français pour les villes moyennes comme Niort, est devenu un enjeu plus important. La régulation, à mes yeux, se fait grâce à des outils comme les Epl. Il faut espérer que nous soyons, à un moment ou un autre, considéré comme des acteurs importants à l’échelle de ce qui se passe dans les territoires ».

L’urgence sociale monte 

Première adjointe au maire de Villeurbanne et présidente de la Sem SVU, Agnès Thouvenot a insisté sur « l’urgence sociale » qui monte « sur des problématiques de logement. Les gens n’arrivent plus à se loger. Nous faisons pour le mieux mais ce n’est pas simple ». Un constat partagé par Marie Quinton, adjointe au maire de Tours, présidente de la FedEpl du Centre-Val-de-Loire, qui appelle « à une vision nationale du logement. Notre capacité de résilience et l’inventivité des Epl (ndlr, elle est aussi présidente de la Sem Ligeris de Tours) permettent de faire face, mais nous avons besoin de moyens financiers supplémentaires et d’une fiscalité nouvelle adaptée à ces défis », poursuit-elle. Le mot de la fin de cette séquence est revenu à Kosta Kastrinidis, directeur des prêts de la Banque des Territoires, qui a mis l’accent sur les prêts à long terme octroyés par la Banque des Territoires, « jusqu’à 80 ans pour étaler la charge foncière sur une maturité assez longue. Nous avons une double urgence à traiter, sociale et écologique. Elle passe par un financement adapté à ces enjeux ».

La FedEpl passe aux propositions

La journée s’est terminée par l’intervention de Philippe Laurent, maire de Sceaux, président de la FedEpl. 11 propositions guideront l’action de la Fédération des élus des Entreprises publiques locales dans les prochains mois. Vous pouvez les retrouver en cliquant ici.

 

 

Par Philippe CLEMANDOT
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