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À défaut d’un programme, les trois « remplaçantes » de Christophe Béchu s’accordent sur la méthode

Publié le 4 octobre 2024

Catherine Vautrin, Agnès Pannier-Runacher et Valérie Létard se partagent les portefeuilles dévolus à Christophe Béchu dans les gouvernements Borne et Attal. Sans feuille de route précise, dans l’attente de la déclaration de politique générale que Michel Barnier prononcera à l’Assemblée nationale le 1er octobre prochain, elles s’accordent en revanche sur la méthode qui permettra de faire passer les projets auprès d’un Parlement fracturé. Alors que la crise du logement s’éternise, Valérie Létard souhaite ainsi « trouver des majorités de projet et faire avancer des solutions au bénéfice de l’intérêt général ».

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Article proposé par Cadre de Ville, dans le cadre d’un partenariat éditorial avec la FedEpl.

Il y avait foule, lundi 23 septembre au matin, pour assister à la passation de pouvoirs la plus pléthorique du nouveau gouvernement. Le super-ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires dirigé par Christophe Béchu cède la place à trois ministères de plein exercice. Celui du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation, dévolu à Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités dans le précédent gouvernement, celui de la Transition écologique, de l’Énergie, du Climat et de la Prévention des risques, qui échoit à Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée à l’Agriculture dans le gouvernement Attal mais aussi ministre de la Transition énergétique dans le gouvernement d’Elisabeth Borne, et enfin, celui du Logement et de la Rénovation urbaine, confié à Valérie Létard, députée du Nord et ancienne vice-présidente du Sénat, alors très impliquée sur le dossier ZAN et notamment sur la proposition de loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de zéro artificialisation nette, adoptée par le Parlement en juillet 2023.

Une ministre du Logement très attendue

Très applaudie à l’issue de sa prise de parole, cette dernière est surtout très attendue, dans le contexte de crise aiguë que traverse le secteur. Elle n’a d’ailleurs pas manqué de rappeler le signal fort que le Premier ministre avait envoyé en faisant « le choix d’un ministère de plein exercice. Il y a un travail à faire rapidement, fortement, et vous le savez ce n’est pas aujourd’hui que je vais apporter les réponses. Mais s’il y a dans ce gouvernement un ministère de plein exercice, c’est parce que le Premier ministre considère que le logement est au cœur des priorités et des préoccupations ».

Il y a là un enjeu social, explique la ministre, rappelant que le coût du logement et des charges absorbe 40% du pouvoir d’achat des ménages moyens, voire 50% pour les ménages modestes. Il y a aussi un enjeu environnemental, « consubstantiel de ce sujet », avec la rénovation du parc existant et la décarbonation des filières de l’aménagement et de la construction. Mais l’enjeu le plus criant est économique, reconnaît Valérie Létard : « si nous ne prenons pas en compte l’ensemble de la filière du logement, du bâtiment aux architectes et aux notaires, si nous ne travaillons pas avec eux sur les solutions à venir, si nous ne les aidons pas, nous allons avoir des difficultés à sortir de la crise. Cela se fera pas à pas et dans un contexte budgétaire difficile mais j’y mettrai toute mon énergie ».

Sursis législatif pour les chantiers de Guillaume Kasbarian 

En prenant la succession de Guillaume Kasbarian, nommé ministre de la Fonction publique, de la Simplification et de la Transformation de l’action publique dans le nouveau gouvernement, après 6 mois en poste en tant que ministre délégué chargé du Logement, où il laisse derrière lui de nombreux chantiers législatifs en plan, notamment le projet de loi relatif au développement de l’offre de logements abordables, encore susceptible d’être repêché (lire l’article de l’édition juridique de Cadre de Ville sur la « reprise des travaux à l’Assemblée nationale »), Valérie Létard se dit consciente de « l’ampleur de la tâche, à un moment où nous sommes à la croisée des chemins, où les attentes n’ont jamais été aussi fortes ».

Elle se refuse toutefois à agir dans l’urgence et attend le discours de politique générale que Michel Barnier prononcera à l’Assemblée nationale le 1er octobre pour disposer, avec l’ensemble du gouvernement, d’une feuille de route partagée. Dans l’immédiat, elle sera donc à l’écoute de l’ensemble des acteurs pour tenter de « co-construire » une réponse à la crise. D’abord les parlementaires, qu’elle rencontrera dès mardi, pour « s’imprégner de leurs préoccupations et de leurs priorités d’élus », puis les acteurs du logement social, la ministre ayant prévu de se rendre dès mercredi au Congrès HLM, à Montpellier.

Suivra le temps des arbitrages, précipité par le débat sur le projet de loi de Finances pour 2025 : « tout le monde se rend compte que cet enjeu fait consensus, de façon transpartisane. Reste à savoir comment on trouve les moyens. Le budget est complexe. Comment faire les bons choix, comment partager ces choix et comment faire en sorte d’y associer un maximum de sensibilités politiques ? Je travaillerai de façon consensuelle pour essayer de trouver des majorités de projet et faire avancer des solutions au bénéfice de l’intérêt général », livre-t-elle en marge de la cérémonie.

Écologie populaire contre écologie punitive

Autre ministre convaincue de la nécessité d’une approche transpartisane, et d’ailleurs experte dans ce domaine, comme elle l’avait démontré en faisant adopter au Sénat, à une quasi-unanimité, le projet de loi sur l’accélération de la production d’énergies renouvelables, Agnès Pannier-Runacher.

Saluant la qualité du travail réalisé par Christophé Béchu, qui lui laisse de nombreux dossiers arrivés à maturité, de la SNBC (Stratégie nationale bas carbone) au Pnacc (Plan national d’adaptation au changement climatique), en passant par les stratégies énergie-climat et alimentation-climat – « tout est finalisé ou en voie de l’être, on a bien travaillé à Roquelaure » a-t-elle tenu à souligner – la ministre de la Transition écologique, de l’Énergie, du Climat et de la Prévention des risques estime que l’enjeu principal sera de « construire, vite, une écologie populaire, où chacun trouve son compte et son intérêt et qui ne soit pas perçue comme une longue litanie de normes punitives et restrictives ».

« Nous avons fait beaucoup, poursuit-elle, mais nous n’avons pas encore réussi à porter ce discours auprès des territoires. La première urgence est donc de poser des mots clairs sur les bénéfices concrets de l’écologie pour chacun, quel que soit son revenu et son lieu de résidence. C’est ma première ambition, la justice sociale et territoriale », conclut-elle, dans un clin d’œil appuyé à la troisième ministre amenée à succéder à Christophe Béchu, Catherine Vautrin, ministre du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation.

Un champ d’action partenarial

Troisième dans l’ordre protocolaire du nouveau gouvernement, celle-ci avait ouvert cette séance de passation en saluant ses « 3F », soit les ministres délégués qui l’accompagneront dans ses missions. Il s’agit de François Durovray chargé des Transports, de Françoise Gatel chargée de la Ruralité, du Commerce et de l’Artisanat, et de Fabrice Loher chargé de la Mer et de la Pêche.

Sans surprise, le thème de l’environnement est arrivé en tête de son allocution. L’ancienne présidente de la Communauté urbaine du Grand Reims a ainsi cité le climat comme étant « le défi de nos politiques publiques communes ». « C’est ensemble que nous devons, dans la diversité de nos responsabilités, porter ces sujets », indique-t-elle.

Pour les transports, premier secteur émetteur de gaz à effet de serre, Catherine Vautrin admet qu’elle vient de rejoindre un « ministère aux contours complexes avec la claire conscience qu’il faudra écouter, dialoguer avant d’agir ». Un message adressé aux élus locaux à qui elle promet « une attention particulière à leurs moyens d’agir ». La ministre s’est également engagée à « développer des infrastructures décidées dans le cadre des contrats de plan », aussi bien à l’échelle des ports que des chemins de fer ou de l’aviation. Un maillage qui interviendrait également « dans le cœur des villes et au cœur de nos villages » afin notamment de favoriser l’accès à l’emploi.

La ministre s’est enfin adressée à ses nouvelles partenaires, actrices d’un vaste champ où les enjeux se recouvrent et se recoupent. S’adressant à Valérie Létard, elle déclare : « nos échanges seront particulièrement fréquents, tant l’accès au logement est une priorité pour de nombreux Français ». Le partenariat avec les territoires sera en effet l’une des clés pour sortir de la crise du logement.

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