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Michel Barnier veut faire évoluer la réglementation ZAN pour « revitaliser la construction de logements »

Publié le 8 octobre 2024

L’aménagement des modalités de mise en œuvre du ZAN et, plus largement, l’allègement des contraintes qui pèsent sur les acteurs de l’aménagement et de la construction sont au cœur des premières mesures anti-crise annoncées par le Premier ministre dans son discours de politique générale. À l’heure où la territorialisation des objectifs de sobriété foncière suscite de fortes incompréhensions et oppositions, l’évolution annoncée se fera « de manière pragmatique et différenciée » a indiqué Michel Barnier. Autres concessions faites à la filière logement, le rétablissement du Prêt à taux zéro sur l’ensemble du territoire pour les primo-accédants et la simplification des normes pour la construction de logements neufs.

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Article proposé par Cadre de Ville, dans le cadre d’un partenariat éditorial avec la FedEpl.

La déclaration de politique générale du Premier ministre, prononcée la semaine dernière devant les députés, 26 jours après sa nomination et 10 jours après la constitution du gouvernement, a apporté des réponses, souvent très concrètes, à plusieurs situations de crise qui réclamaient des mesures d’urgence. C’est en particulier le cas du logement, qui figure explicitement parmi les priorités du nouvel exécutif. « Premier poste de dépense des Français », il constitue l’un des leviers permettant d’améliorer leur niveau de vie, premier des 5 chantiers engagés par Michel Barnier. « La baisse des taux d’intérêt est une bonne nouvelle pour relancer les crédits immobiliers, a relevé le Premier ministre, mais l’État et les collectivités territoriales doivent amplifier ce signal, pour créer de la croissance et revitaliser la construction de logements ».

Un retour en grâce qui doit sans doute beaucoup à l’influence de Valérie Létard, ministre du Logement et de la Rénovation urbaine de plein exercice, qui disait la semaine dernière, à l’issue du Congrès HLM, où elle a eu l’occasion de rencontrer de nombreux acteurs du secteur, sa détermination à « se battre pour obtenir le plus possible ». Les revendications formulées à cette occasion par l’Alliance pour le logement semblent en effet avoir été entendues, plusieurs annonces du Premier ministre, notamment sur l’extension du PTZ ou la simplification des normes de construction neuve, constituant des réponses directes à ces attentes.

La réglementation ZAN appelée à évoluer « de manière pragmatique et différenciée »

Mais pour Michel Barnier, l’enjeu principal se situe ailleurs, et bien plus en amont. « Pour construire, il faut du foncier », rappelle-t-il, faisant sien le diagnostic qui avait émergé il y a de nombreux mois du CNR Logement. Le secteur tout entier avait alors souligné que la question foncière, qui pèse très fortement sur les coûts de sortie des opérations, constituait bien le nerf de la guerre, sans susciter alors de réponse ciblée de l’exécutif. Près d’un an plus tard, le projet de loi sur le logement abordable élaboré par Guillaume Kasbarian, alors ministre délégué chargé du Logement, comprenait une première mesure de régulation des prix du foncier, avec l’instauration d’un droit de préemption urbain élargi dont les maires pouvaient user face à des prix de cession jugés excessifs. L’avenir du texte, qui pourrait être repêché, est encore incertain et rien ne dit qu’une telle mesure reviendra dans les prochains mois à l’agenda législatif.

Car, pour l’heure, le Premier ministre veut surtout libérer les acteurs de l’aménagement des contraintes qui pèsent sur eux. Un peu plus d’un an après l’adoption de la proposition de loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de zéro artificialisation nette, proposition de loi d’origine sénatoriale à laquelle Valérie Létard avait largement contribué, Michel Barnier souhaite à nouveau aménager les modalités d’application du dispositif, dont la déclinaison territoriale, des Sraddet aux SCoT, suscite toujours de fortes oppositions et incompréhensions : « nous devons faire évoluer de manière pragmatique et différenciée la réglementation Zéro artificialisation nette pour répondre aux besoins essentiels de l’industrie et du logement » a déclaré le Premier ministre, annonce qui a suscité de nombreux applaudissements des parlementaires, en particulier sur les bancs des Républicains.

Extension du PTZ à l’ensemble du territoire pour les primo-accédants 

Autre priorité de Michel Barnier, l’accession à la propriété. Depuis deux ans, le « rêve pavillonnaire » est devenu inaccessible pour de nombreux ménages, en particulier les plus modestes, avec la hausse des coûts de construction et l’envolée des taux d’intérêt qui ont largement érodé leurs capacités d’achat. Résultat, la construction de maisons individuelles s’est effondrée, tendance aggravée par les mesures de recentrage du PTZ sur les zones tendues décidées fin 2023 par le gouvernement d’Elisabeth Borne. Près d’un an plus tard, les CMIstes sont aux abois et la FFB estime que près de 60 000 emplois auront été détruits dans l’ensemble de la filière logement d’ici la fin 2024.

Une dégradation rapide qui pousse aujourd’hui l’exécutif à lâcher du lest : « dans un contexte de crise du secteur de la construction, il nous faut des mesures rapides pour l’investissement locatif et l’accession à la propriété, notamment chez les primo-accédants, pour lesquels le gouvernement est favorable à l’extension du prêt à taux zéro sur tout le territoire », a déclaré le Premier ministre, suscitant là encore de nombreux applaudissements. Et si le mot « Pinel » n’a pas été prononcé, une dernière revendication des promoteurs semble avoir été entendue, Michel Barnier souhaitant « simplifier au maximum les normes qui pèsent sur la construction de logements neufs ou la réhabilitation des logements anciens ».

À la recherche de majorités de projet

D’autres mesures sont évoquées, notamment pour fluidifier le parcours résidentiel des Français et remettre de la mobilité dans le parc social. « Le logement social ne devrait être qu’une étape, rappelle le Premier ministre, qui souhaite que les bailleurs puissent « réexaminer régulièrement la situation de leurs locataires afin d’adapter les loyers à leurs ressources », faculté qu’ils exercent déjà mais dont les modalités, des plafonds de ressources aux niveaux de revalorisation des loyers, pourraient être revues. « Il faut également donner plus de pouvoir aux maires dans l’attribution et la priorisation des logements sociaux sur leur territoire », souhaite le Premier ministre, mesure qui figurait, rappelons-le, dans le projet de loi sur le logement abordable présenté au printemps par Guillaume Kasbarian.

Enfin, le Premier ministre a promis « un DPE simplifié et un calendrier adapté », mesure qui pourrait laisser sur le marché locatif les nombreuses passoires thermiques qui étaient appelées à en sortir à compter du 1er janvier 2025. Dans ce domaine, la réduction de la dette écologique devra donc patienter quelques mois de plus.

Si certaines mesures relèvent du réglementaire, d’autres devront passer devant le Parlement et trouver des majorités de projet. Michel Barnier en est bien conscient et a d’ailleurs promis un partage de l’ordre du jour plus important entre le Parlement et le gouvernement, pour y inscrire des textes transpartisans : « la clé est entre vos mains », déclare-t-il, appelant à la « confiance dans notre capacité collective à franchir les obstacles (…) Recherchons des chemins communs, dégageons des compromis, relevons la ligne d’horizon (…), prenons soin de la France et des Français, ils nous demandent de dépasser nos divisions et d’agir pour l’intérêt supérieur du pays ». Premiers éléments de réponse le 9 octobre prochain, avec l’ouverture des débats sur le projet de loi de Finances pour 2025.

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