Dans une économie moderne où les circuits courts sont en plein développement, les abattoirs locaux auraient-ils une carte à jouer ? Paradoxalement, « les difficultés économiques et les exigences sanitaires ont petit à petit entraîné la fermeture de beaucoup d’entre eux », explique Isabelle Froux, du service qualité et alimentation de l’Apca. Une tendance confirmée par Yuna Chiffoleau, chercheur à l’Inra et chef de file du groupe Agriculture et alimentation du Réseau rural français de 2009 à 2011. « Les conséquences sont économiques pour les petits éleveurs, mais c’est aussi une menace pour la biodiversité dans l’agriculture », s’inquiète la spécialiste des circuits courts.
Si les abattoirs industriels de groupes couvrent aujourd’hui les trois quarts des besoins de la filière viandes, « d’autres abattoirs sont nécessaires pour couvrir les besoins de services de proximité, y compris dans les territoires spécifiques comme les îles », ajoute Xavier Ravaux, inspecteur général de la Santé publique vétérinaire, dans son rapport sur la filière « Abattoir » établi en 2011. Des collectivités locales l’ont bien compris, comme en Martinique, où Région et Conseil général n’ont pas hésité à investir pour conserver un abattoir départemental moderne, sous forme de Sem.
Des partenariats public-privé prometteurs
A l’origine exclusivement publique et aux mains des municipalités, la prestation de l’abattage s’est en effet progressivement privatisée, souvent reprise en main par des géants du secteur lié à l’industrialisation de la filière viande. Si les abattoirs publics sont encore une centaine dans l’hexagone, ils couvrent désormais moins de 10 % du tonnage abattu. Du coup, nombre d’abattoirs de proximité ont disparu. Pour les professionnels, des structures publiques-privées, telles que Sociétés d’économie mixte (Sem), pourraient apporter une réponse pertinente au problème.
« Il faut que les collectivités restent impliquées, mais en favorisant également l’implication des utilisateurs », commente Paul Mazerand, délégué du président de la Fédération nationale des groupements et coopératives de la boucherie charcuterie française. A Tarbes, par exemple, l’abattoir a en effet retrouvé un nouveau souffle depuis sa transformation en Sem, en regroupant des opérateurs clés, comme le groupe Arcadie et la Sica. Dans le même type de stratégie, les élus et professionnels se sont mobilisés dans le Morbihan à l’initiative de la Communauté de communes du Val d’Oust et de Lanvaux (CCVOL), afin d’ouvrir dès 2014 un abattoir sous forme de Sem.