12 Md€ de chiffre d’affaires, 26 000 emplois, 60 000 acheteurs (du petit commerçant à la centrale d’achat en passant par les collectivités), 1,7 million de mètres carrés bâtis, 550 ha de foncier aménagés… Les Marchés d’intérêt national (Min) constituent à la fois une puissance économique, un outil indispensable à l’organisation de la distribution des produits frais agroalimentaires et, comme le précise la législation française, des « services publics de gestion des marchés ».
Les lois de décentralisation ont conduit les Régions à assumer les décisions relatives à la création et à l’implantation des marchés de gros, à leur classement en Min ou leur déclassement, décisions qui doivent toutefois faire l’objet d’un décret pris en Conseil d’Etat. Sur le terrain, c’est aux collectivités territoriales situées sur le territoire des Min de gérer ces structures. Elles le font par délégation de service public.
En 2004, l’Etat a mis en œuvre une réforme des Min. Cette dernière prévoit notamment la mise en concurrence des opérateurs dans les processus de désignation des gestionnaires. Les Min peuvent donc être gérés aujourd’hui aussi bien par des structures privées que publiques. Les sociétés d’économie mixte restent très présentes dans le secteur puisque 14 Min sur 19 sont gérés par des Sem.
Mais aujourd’hui, la législation française est rattrapée par la directive Bolkestein dont les dispositions doivent être transcrites dans le droit national. La directive européenne sur l’organisation des services dans l’espace communautaire, fort décriée en 2006 notamment parce qu’elle projetait de permettre aux entreprises des pays de l’Union de s’installer sur le territoire de n’importe lequel autre Etat membre en conservant leur législation sociale d’origine, vise à supprimer tout ce qui à Bruxelles peut être considéré comme une entrave à l’exercice de la libre concurrence. Or, la loi française crée autour de chaque Min un périmètre dit « de référence », dont le contour est fixé par l’Etat, à l’intérieur duquel aucun des produits agroalimentaires frais distribués sur les marchés ne peut faire l’objet d’un commerce de gros de la part d’une autre structure.
L’esprit de loi française est précisément « de promouvoir la permanence d’un marché physique pour les produits périssables, considéré comme un gage de libre concurrence au stade de gros ». Et c’est aussi au nom de cette « libre concurrence » que la directive européenne envisage de supprimer ces périmètres de référence. Le secrétariat d’Etat chargé du Commerce a mis en place un groupe de travail auquel participent les représentants des Min et notamment leur fédération nationale qui a créé de son côté un comité technique chargé d’étudier la question. Les travaux devront déboucher avant le 28 décembre prochain, date limite fixée aux Etats par l’Union européenne pour transposer le texte.