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Île-de-France

Cendrine Chapel (funéraires Paris) : « Insister sur la plus-value du secteur public »

Publié le 3 novembre 2023, par Stéphane Menu

Le secteur du funéraire est en pleine mutation : le nombre de décès augmente, les attentes des familles évoluent, soucieuses d’un accompagnement personnalisé. Dans un tel contexte, les acteurs publics entendent faire valoir leur différence. C’est pour cette raison que la Fédération des élus des Entreprises publiques locales a décidé, début 2023, de publier un « guide funéraire », en partenariat avec l’UPFP (Union du pôle funéraire public). Ce guide est téléchargeable (voir la fin de l’article). Entretien avec Cendrine Chapel, directrice de la Sem des services funéraires de la ville de Paris.

(Photo Ville de Paris)

Destiné aux élus, ce guide fournit des éléments chiffrés sur l’activité du secteur public funéraire. Des entretiens sont proposés avec des présidents et directeurs d’Epl. L’occasion d’en reparler avec Cendrine Chapel, directrice de la Sem des services funéraires de la ville de Paris. « Ce guide était attendu, il est la concrétisation d’un besoin exprimé depuis longtemps par les Epl pour mieux faire connaitre leur action dans le funéraire. Je suis ravie de cette parution parce que le secteur est extrêmement concurrentiel et les Epl ont des atouts à faire valoir face aux entreprises privées ». Cette concurrence se lit dans les chiffres d’affaires des entreprises publiques locales et de ceux du privé ; à titre d’exemple, la Sem des services funéraires de la ville de Paris réalise 14 M€ de CA chaque année, contre 750 M€ pour le groupe OGF ou encore 450 M€ pour Funecap. « Nous sommes amenés à répondre à des offres agressives sur le plan financier, nous n’avons pas les même moyens et nos offres peuvent être moins interéssantes sur les propositions de redevances par exemple. Mais nous avons un atout à défendre, celui de la qualité du service et du contact avec les administrés, en lien avec la gouvernance politique qui caractérise notre action », poursuit la directrice. Car, en effet, les attentes du public évoluent.

Indirectement, la présence d’une Epl fait baisser les prix du marché

L’ouverture du marché au privé a éloigné une question essentielle : le service funéraire est-il un service public à part ? Les élus considèrent-ils que ce secteur peut leur échapper ? « La forme juridique de la Sem permet d’avoir un outil en dehors d’une logique exclusive de profit qui permet que les dividendes soient réinvesties dans la société, pour améliorer le matériel, offrir de nouveaux services, et donc ne pas partir dans la poche d’actionnaires privés ». Par ailleurs, une redevance est reversée à la commune qui, de ce fait, est en mesure d’investir cet argent sur d’autres projets. « Nos tarifs sont généralement moins élevés, ce qui fait que dans les villes où nous sommes, le privé doit rationaliser sa propre grille tarifaire en prenant en compte cette réalité ».

Miser sur la plus-value des services

Outre le prix, le funéraire public veut faire la différence à la fois sur la qualité du service rendu mais aussi sur d’autres sujets où le privé est moins à l’aise. « Nous utilisons nos marges financières à financer de nouveaux services, comme par exemple le recours à des socio-anthropologues permettant de travailler avec la famille du défunt sur le sens de la mort, sur la mise en œuvre du rite ». A Paris, la Sem a été l’une des premières à développer le principe d’un faire-part électronique à envoyer aux proches, des livrets de condoléances gratuits directement sur internet ou encore l’utilisation d’un corbillard électrique et des urnes biodégradables. Pour beaucoup de familles, ce ne sont pas des détails et les défunts souhaitent aussi mourir comme ils ont vécu, en citoyen responsable », explique Cendrine Chapel. « Si vous êtes dans une seule approche économique, ces initiatives-là, vous ne le prenez pas ».

Le rôle de la Sem auprès des Ehpad pendant la crise sanitaire

Pendant la crise sanitaire, la Sem a eu à se mobiliser, face à une recrudescence du nombre de décès. « Nous n’étions pas les seuls à être sur le pont. Mais 70 % des décès liés au Covid dans les Ehpad, lors de la première vague de décès à Paris, c’était nous. Certains Ehpad nous appelaient désespérés parce qu’ils n’avaient que nous pour assurer la levée des corps ». La Sem répond aux appels d’offres des tribunaux pour intervenir dans des situations complexes ; la liste est malheureusement longue : canicule de 2003, le Bataclan, Charlie Hebdo… « En tout, nous répondons à 3 000 réquisitions chaque année pour des morts suspectes, à savoir des personnes victimes de crime, d’autres mortes chez elles depuis longtemps. Il faut être formés à ce type d’intervention », assure-t-elle. Bien sûr, dans les villes – et elles sont nombreuses- où le public n’est pas présent, le privé fait face. « Sur les décès de masse, je pense au Bataclan, il faut être en mesure de transférer à la morgue plus d’une trentaine de corps en moins de trois heures. Ce sont des moments difficiles à vivre ».

Création d’une Spl pour renforcer la présence publique

La Ville de Paris  sait aussi s’adapter à la loi de la commande publique. Récemment, elle a créé une Spl Funéraire de Paris dans la foulée de la perte de la gestion du crématorium du Père Lachaise, « un vrai traumatisme pour nos équipes ». Le marché est allé au privé. La Ville  a créé une Spl avec le Sicomu, qui regroupe les communes de Orsay, Palaiseau et les Ulysse. «  Ce qui lui permet de confier directement ses équipements à cette structure 100% publique tout en conservant la Sem  qui conserve le marché des parquets et la gestion de chambres funéraires  et de crématorium en dehors de Paris», conclut la directrice.

Pour télécharger le guide sur le funéraire public, cliquer ici

 

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