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Nouvelle-Aquitaine

Dans les Pyrénées Atlantiques, « le métier d’aménageur n’est plus le même »

Publié le 3 mai 2024, par Stéphane Menu

Le temps n’est plus aux grandes opérations d’aménagement. Avec les deux Epfl avec lesquels il travaille, Nicolas Freida, PDG de la Spl des Pyrénées Atlantiques, intervient dans des petits bourgs où le lien social s’est délité. L’aménageur doit le retisser pour éviter de graves crises sociales.

Unerue centrale d’Hasparren, où la Spl des Pyrénées Atlantiques intervient (Photo Wikimedia Commons).

Le directeur de la Spl des Pyrénées Atlantiques, Nicolas Freida, confirme que sa société travaille régulièrement avec deux Etablissements publics fonciers locaux (Epfl), ceux du Pays Basque et du Béarn. « Nous avons oeuvré pour la ville de Pau, dans le cadre d’Action cœur de ville mais pas seulement. Le dispositif Petites villes de demain permet aussi de travailler sur de la fine dentelle, dans le cadre d’opérations complexes. La rareté du foncier nous oblige désormais à élever notre niveau de technicité pour trouver des solutions opérationnelles », explique-t-il. C’est dans ce cadre-là que les Epfl sont amenés à croiser la route de la Spl. Dans le Pays Basque, la tension sur le foncier est telle que les logements ont du mal à sortir de terre et que les entreprises fuient vers les Landes, notamment celles qui proposent des activités industrielles.

Dépasser l’insoluble problématique du foncier via sa dissociation

« Désormais, tous les programmes, ou presque, reposent sur le BRS. Le foncier ne peut se porter que sur du très long terme, pour favoriser l’accession sociale », poursuit Nicolas Freida. Le marché est pris en tenaille : la forte augmentation des prix empêche les particuliers d’acheter, eux-mêmes bloqués par la difficulté d’accéder au crédit ; le marché du très grand luxe mène tranquillement sa vie ; le locatif social est de ce fait bloqué. « Seul le BRS permet de construire. Il faut se rendre à cette évidence, je crois beaucoup à la dissociation du foncier et du bâti sur le long terme. Nous sommes en train de changer de paradigme, les Anglais font ça depuis longtemps, les promoteurs, les bailleurs, les constructeurs doivent conserver la main sur le foncier pour s’assurer de la maîtrise des retombées des programmes ».

Habiter ne doit plus être une notion inaccessible

Nicolas Freida va même plus loin. Il interroge le lien culturel que nous avons à la propriété. « Les jeunes couples, quand ils le peuvent, achètent un bien, et veulent faire une plus-value pour le léguer aux enfants. Or, les jeunes ont justement beaucoup de mal à se loger. Les personnes plus âgées restent chez elles dans des logements trop grands pour eux. Ceux qui ont le plus besoin de volume, à savoir les jeunes familles, sont bloqués dans cette chaîne de valeur du logement ». Les grands programmes d’aménagement d’après-guerre ont montré leurs limites, l’heure est à la remise sur le marché de logements ayant disparu de la circulation, etc. « Dans la colère des Gilets jaunes, il y a cette notion d’inaccessibilité, tout simplement, aux logements. Il n’est pas étonnant à mes yeux que Simon Teyssou, architecte et urbaniste, ait reçu le grand prix de l’urbanisme 2023, pour ses travaux sur l’aménagement rural », assure-t-il. « Nous changeons de monde, tout simplement et ça se passe sous nos yeux ».

Redonner vie à des communes en état de léthargie

Nicolas Freida échange souvent avec son président de la Spl, Philippe Echeverria, par ailleurs conseiller départemental dans les Pyrénées Atlantiques. « Il élève 250 brebis. Sur la récente crise de l’agriculture, il m’a expliqué qu’à ses yeux, il s’agissait avant d’une impossibilité à renouer du lien social. Il faut trouver les modalités pour le recréer ». Comment ? A Hasparren, l’Epfl du Pays Basque a racheté une grosse maison familiale qui disposait d’un atelier où l’on construisait des chaussures. « Nous avons mené avec l’établissement foncier et la mairie un travail à la fois technique, juridique et financier pour lui trouver une nouvelle destination, à savoir celle de dédier le lieu pour en faire des logements pour les personnes âgées, gérés par une association. Nous devons redonner vie à des communes que l’on a laissé mourir ». Nicolas Freida regarde son métier différemment. Le temps de la construction n’est plus le même, il faut repartir d’endroits bâtis où les gens ne vivent plus, pour redonner aux lieux une âme, en déployant de fortes aménités. « De l’autosuffisance alimentaire aux mobilités, de la préservation des ressources de la biodiversité aux exigences de rénovation thermique, l’aménagement change de registre et doit servir aux hommes à vivre mieux ensemble, et pas seulement chez eux », conclut-il.

 

  • Pour en savoir plus sur les coopérations entre Epfl et Epl dans l’aménagement des territoires à l’ère du ZAN, consultez la publication co-éditée avec l’Association nationale des Epfl.
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